dimanche 26 décembre 2010

Je suis le pays



Par Bent Trad ( Traduction libre d'Azwaw)

Je suis le pays

Aux âmes fauchées,

Aux enfants calcinés,

Aux Amazighs capturés,

Et que certains m’ont bradé avec tous mes secrets.

***

Je suis le pays,

Qui est tel un cheveu sur la langue,

Qui te fait perdre tes mots

Et te transforme en sot.

***

Je suis le pays,

Des chômeurs, des « cannabis-vores »,

De ceux qui sont perdus loin des sémaphores

Englouti, décomposés, déchiquetés par des harengs saurs

Faits divers, devint, leur histoire et leur triste sort.

***

Je suis le pays,

De la fange et des bas fonds

Quand j’infante je pète les plombs,

J’asservis les cœurs comme les mains,

Des bons, des salauds et des cons.

***

Moi, je ne vaux que dalle

De l’avoir aimé

Et je ne sais ni comment, ni pourquoi

Je suis le pays qui n’existe point.

***

Je suis la « Dinarocratie »

Qui grossit les comptes bancaires loin d’ici,

Je m' balance de vot’ sueur et de vot’ force de bras sans merci.

***

Je suis le pays qui le jour avale le fruit,

Injurie la foi la nuit,

Et crée dans les cœurs mille et un soucis.

J’ai légitimé la lèche des culs,

La voyance à peu d’écus,

Brillé dans la diversion à vue,

La contrefaçon et le « nul et le non avenu ».

***

Je suis le pays errant,

Aux rêves éveillés,

Aux trippes de corbeaux et reptiles noyées,

Un pays cadavérisé,

Qui chlingue de tous les côtés.

Femme, quand je parle de mes enfants, je suis hideuse,

Je ne m’autorise ni Amour ni pause,

Je n’aime que baffes, coup de pieds au cul et ecchymoses.

***

Je suis le pays des steppes moujiks,

Du dévergondage politique,

De l’intelligentsia pathétique,

De l’affranchissement burlesque et comique,

Slogans, déférence, prestance, solennité et autres balivernes linguistiques

Ainsi et cette grâce, à l’heure des résolutions, les gens s’en font une belle chique.

***

Je suis le pays de la Faim,

Du froid sous le sein,

Le bienaimé en moi est soit mort ou d’une profonde blessure souffrant,

Mon poète est débauché, voyou et ruffian,

De bar en bar, titubant, hâbleur et rimes monnayant.

Un Sado- maso offrant sa peau au brasier brulant.

***

Je suis le pays,

Que la vie ne vous en a rien raconté !

Faudrait que de vos yeux vous le voyez,

Que pour moi vous bruliez …

Je suis le pays des maîtres

De la répression des êtres,

Esclaves, humiliés, dévots, prosternés et croyants,

Mais….bannis de toute décision.

***

Je suis un pays

Où le pain se vend à la sauvette,

Le blé sur mon sol,

Est désormais un vol,

Une tare, que dis-je, blasphème impie !

C’est là où l’exploitation commence,

Que l’ enculage n’est plus offense,

Et que blâme et réprobation sont la sentence !

***

Je suis le pays

Des mines qui sautent,

Après avoir été pays de douces mélodies et de notes,

Je suis devenue, sous l’Olivier, un troupeau paissant,

Encore et encore, criant et réclamant,

Plus de coups de pieds au cul, en se trémoussant,

Plus d’offenses et d’injures à nos aïeux …

Les cons ce n’est pas vous, c’est plutôt nous, les gueux…

***

Je suis le pays

Du bouge, de la turne, de la taverne putréfiée,

De la tourmente qui nous a empalés, et enculés,

« Et alors, c’est ainsi, avec ma langue empoisonnée

Et mes gros mots pourris et talés,

Si tu n’es pas content, à qui de droit tu peux notifier !

La langue ce n’est pas moi qui l’ai fabriquée…. »

***

Je suis le pays

Des larmes qui câlinent de faim,

Le pays qui a trainé dans la vase

Le sens de « Non à l’humiliation »

Après que j’ai rassemblé en mon sein,

La gauche,

Les Frères,

Les marxisants et les barbes hirsutes.

***

Je suis le pays,

Qui a chassé un homme,

L’éloignant d’une femme,

Qui, quand elle l’a aimé

Ne le lui a pas dit.

Elle s’est dite : « Je ne sais comment pardi !?»

Beaucoup comme lui, comme elle, tu verras…

De nostalgie rongés, leurs affaires en ballots,

Quittèrent le pays, sa misère, ses gens,

Indifférents à l’existence ou non de l’électricité

Et de l’eau courante !

Eux au moins c’est des hommes !

Quant à nous que le diable nous emporte !

***

Tu es le pays,

Nous t’avons aimé,

Sans t’abandonner.

Nous t’avons donné,

Sans te blâmer.

Même si tu nous as meurtris,

Humiliés, jetés par terre,

Nous nous somme brulés,

Mais nous ne t’avions pas brulé.

***

L’un s’est immolé et du feu s’est embrasé !

Un autre s’est brulé de son esprit en tourment !

Un autre du militantisme a flambé !

Un autre de la piquette il s’est grillé le foie !

Une autre, il lui a brulé le visage pour qu’elle ne vive à jamais la joie !

Une autre, il lui a embrasé son âme, a volé le feu, et quitté la maison,

Il lui prit la vue des mirettes et semé en elle la haine de son corps et des siens.

Y a celui qui a brûlé mais s’est noyé !

Et celui qui a brûlé et en rentrant en taule qu’on la jeté !

Y a mon écriture qui s’est enflammée,

À cause de ma douleur qui a brûlé par trop d’indifférence…

Celui qui n’a pas de toit où voulez-vous qu’il passe la nuit ?

Laissez lui un peu de poésie et quelques vers !!

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