جمال شلبي في طريق نجع في العويَّات
Le
mahfel, nom de lieu de l’arabe « hafala »
( حفَلَ محفل ) est l’espace naturel et originel des joutes
poétiques et vocales des Ghannayas et Edba. C’est à la fois un espace et un
forum d’échanges entre les artistes d’une part et leur auditoire, hommes et
femmes, et les artistes entre eux dans une sorte de compétition dont le but est
d’arracher l’admiration de leur public.
Avec sa
disposition circulaire, le mahfel offre une grande scène aux Ghannayas pour
évoluer tantôt vers le public des femmes et tantôt vers celui des hommes,
public séparé comme l’exigent les
traditions rurales particulièrement.
Codifié
depuis des générations, le déroulement du tour de chants des Ghannayas, exige
que le premier passage soit donné par respect à l’ainé, soit en signe
d’hospitalité à l’invité (Ghannay venant d’une autre région). Les règles dictent
aussi que le premier « duel » soit consacré à la poésie dite
« Mekaffer » expiatrice où l’on fait les louanges au prophète et
autres poésie du genre ; par la suite c’est une sorte d’échange qui se
fait en respectant l’unité du genre et des mètres poétiques proposés par le
Ghannay précédant. Il arrive aussi que la confrontation prenne des allures de
défis ou de polémiques, genre qu’on appelle « Ahrach » ou agressif –
ce genre de confrontation est très rare de nos jours sauf des cas de simulation
au bonheur des spectateurs-
Le
tour de chant de chacun des Ghannayas et selon les règles du Melhun chanté, se
compose des pièces indispensables que sont :
·
Le
Mouguef (موقف): un poème composé de quatrains, introduit par quatre vers
indépendant, ils peuvent être des Tala’ (طالع), ou bien des ‘Oroubi (عروبي) ou des Salhi (صالحي).
·
Le
Gsim : (قسيم)Un poème à deux vers symétrique.
·
Le
M’seddes : (مسدس) Un poème à
plusieurs strophes de six vers chacune.
Ces
trois morceaux sont chantés en Ad libitum selon un rythme propre à chaque
phrasé d’une région à une autre.
·
Enfin
la Malzouma ou
souga : (ملزومة أو سوقة) qui est un poème chanté selon des rythmes aussi diversifiés que les
mètres des poèmes, avec l’accompagnement de deux « Sa’fas » (سعفاء), des assistants
qui reprennent le refrain.
Le
tour de chant est par ailleurs ponctué par des exhibitions spectaculaires de
« Bardias » (أبَّاردية) qui avec leur tromblons ou carabines exécutent des danses et des sauts
avant de faire feu au sol ou en l’air, lors des passages importants du chant. Les
tirs nourris des Bardias ainsi que les youyous stridents à répétition, donnent
au mahfel et aux Ghannayas plus d’ardeur et d’enthousiasme.
Les terroirs sahélien, mahdois, sfaxien et de Souassi, sont l’espace
géographique où les expressions du Melhun chanté sont les plus vivaces et les
plus prisées populairement. Ces dernières années, ont vu l’éclosion de jeunes
talents qui sont venus assurer la continuité d’un art menacé d’extinction du
fait de la disparition de l’ancienne
génération. Le développement des moyens de diffusion et de communication
moderne (Vidéo,C.D, DVD, internet et autres forum sociaux[1]) a
largement contribué au regain d’intérêt pour le Melhun chanté parmi les
nouvelles générations, un grand sentiment de fierté et de satisfaction se
dégagent chez les passionnés de cet art qu’ils considèrent comme une composante
fondamentale du patrimoine et de la mémoire.
Bien qu’il s’agisse d’un spectacle traditionnel prévu dans des espaces
privés et familiaux, les expériences de transposer les soirées de Ghannayas et
Edba à la scène se sont avérées concluantes. Le festival Jdira de Moknine en
est l’exemple le plus significatif, en effet tous les ingrédients du spectacle
visuel sont réunis, certes un certain nombre d’aménagements tant de l’espace de
représentation qu’à celui des costumes et de la mise en image seraient
nécessaires pour donner au diverses formes du Melhun chanté des régions
précitées plus de visibilité.
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